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Kiffe kiffe demain, de Faïza Guène : l’histoire d’une ado

14 December 2020
« Quand j’étais petite, je coupais les cheveux des Barbie, parce qu’elles étaient blondes, et je leur coupais aussi les seins, parce que j’en avais pas. En plus c’était même pas de vraies Barbie. C’était des poupées de pauvre que ma mère m’achetait à Giga Store. Des poupées toutes nazes. Tu jouais avec deux jours, elles devenaient mutilées de guerre. Même leur prénom, c’était de la merde : Françoise. C’est pas un prénom pour faire rêver les petites filles, ça ! Françoise, c’est la poupée des petites filles qui rêvent pas. »

4ème de couverture

« Doria a quinze ans, un sens aigu de la vanne, une connaissance encyclopédique de la télé, et des rêves plein la tête. Elle vit seule avec sa mère dans une cité de Livry-Gargan entourée d’Hamoudi, un grand de la cité qui l’a connue «haute comme une barrette de shit», Mme Burlaud, la psychologue au porte-jarretelles, Nabil le nul ou encore Aziz, l’épicier du Sidi Mohamed Market avec qui Dora essaie en vain de caser sa mère … »

Mon avis

Si, quand vous entendez parler des « banlieues parisiennes », les premières images qui vous viennent à l’esprit sont les reportages du JT avec des voitures incendiées et des cocktails Molotov, je vous invite à vous procurer ce petit livre. Il vous aidera à déconstruire certaines idées reçues et à porter un nouveau regard sur ces quartiers présentés comme « difficiles ».

Dans un One Women Show hilarant, Doria nous raconte sa vie quotidienne d’ado. Un peu désabusée, mais jamais larmoyante, elle nous parle des regards de pitié de son assistante sociale, des hochements de tête charitables de sa prof bourgeoise, de son pote Hamoudi, qui deal et récite des poèmes. Le ton oscille entre la légèreté et la gravité.

Je vous mets au défis de ne pas ricaner tout au long des 188 pages, qui regorgent de cynisme et de métaphores humoristiques. L’horizon qu’elle décrit est certes un peu triste, mais à chaque page, on ressent l’espoir, le potentiel, la porte de sortie.

En finir avec les clichés, sans vouloir en finir

Cet ouvrage permet de casser certains stéréotypes. C’est d’ailleurs la première qualité que j’ai reconnue à cette histoire : on entend enfin un autre discours que le discours dominant qui passe en boucle sur BFM. Cependant, je suis contente d’avoir complété ma lecture en écoutant l’épisode de La Poudre dans lequel Lauren Bastide reçoit Faïza Guène : il m’a permis de voir ce livre autrement que comme un « reportage sociologique humoristique ».

Dans cet épisode, Faïza Guène, l’autrice, explique qu’elle n’a jamais vraiment considéré avoir écrit un livre « sur le sujet de la banlieue ».  D’une voix amusée, avec un petit cheveu sur la langue, elle explique avoir raconté l’histoire d’une ado de 15 ans, ni plus ni moins (le récit n’est d’ailleurs pas autobiographique). À l’époque, elle n’avait pas spécialement de revendications politiques.

Elle a écrit ce roman très jeune, à 19 ans, sans savoir qu’il allait être publié, et surtout qu’il allait rencontrer un tel succès. Le livre s’est vendu très vite à plus de 400 000 exemplaires, et a été traduit dans vingt-sept pays. Rapidement, Faïza est devenue la coqueluche des médias. Son livre est présenté comme un portrait de la cité, et elle-même est exhibée comme une miraculée (celle qui a réussi à s’élever socialement, qui est sortie de sa condition difficile et s’est extraite de la violence propre à ces quartiers). Elle est qualifiée explicitement de « beurette » dans les titres d’articles des grands médias, un terme désignant les jeunes filles d’origine maghrébine, aujourd’hui controversé, à cause de sa connotation raciste et misogyne.

Pourtant, Faïza explique à Lauren Bastide qu’elle n’avait jamais été confrontée à ce que les médias appellent « la violence des banlieues ». Avec le recul, elle s’étonne (et regrette) d’avoir été objectifiée à ce point. C’est suite à sa médiatisation qu’elle a véritablement été confrontée à la violence.

Même si Faïza Guène dit elle-même « être passée entre les mailles du filet », elle regrette surtout l’image qu’on lui a renvoyé des banlieues, et d’elle-même. Cette stigmatisation ne fait qu’épaissir les murs de ce que certains pourraient appeler des « prisons de bétons ».

Cette interview m’a confrontée à mon propre regard sur la pauvreté et l’immigration, toujours trop simpliste, toujours trop réducteur, et toujours influençable (même en ayant un master en éducation permanente et en travaillant dans l’associatif).

Dans son essai « Les jeunes de banlieue mangent-ils les enfants ? », le politologue Thomas Guénolé déconstruit les clichés que l’on se fait de la « jeunesse urbaine des cités», qualifiée (à demi-mot) de sauvage par les médias, mais aussi (pas toujours à demi-mot) par une grande partie de la population belge/française s’identifiant comme « respectable ». Guénolé utilise le mot assez parlant de « balianophobie ». Il n’est pas question de nier des réalités propres à ces quartiers (concentration de logements sociaux, de populations immigrées et souvent précaires), mais ces réalités sont moins spectaculaires que nos fantasmes : elles sont le résultat de choix politiques, économiques et médiatiques. Il est essentiel de proposer d’autres récits, d’autres représentations. Même si ce n’était pas sa volonté, c’est également ce que Faïza Guène apporte avec son livre.

Une histoire d’ado avant tout

Ce livre est plus qu’un livre sur la cité. C’est, avant d’être une fresque sociale, le portrait d’une jeune fille. Je vous invite à ouvrir ce livre avec comme objectif premier : faire la connaissance de Doria (sans la mettre dans une case). C’est une ado acerbe, qui me fait un peu penser à d’autres héroïnes de littérature jeunesse que j’ai adoré quand j’étais enfant, comme « Le journal intime de Georgia Nicolson », de Louise Rennison, ou « Le journal d’Aurore : jamais contente », de Marie Desplechin. Toutes trois (Doria, Georgia, Aurore) ont cette intonation un peu moqueuse et provocatrice.

Alors certes, Doria n’écrit pas vraiment ses mémoires, mais tout ce qui se passe dans sa tête mérite d’être lu, et apprécié. Elle a un regard aiguisé sur la vie et le monde qui l’entoure. Doria vous fera sûrement sourire, et elle vous apprendra beaucoup.

Encore merci aux Ponctuelles pour l’envoi de ce livre, que j’ai eu la chance de gagner suite à leur concours cet été !

Pour aller plus loin :

Pourquoi il faut arrêter d’employer le mot Beurette – Irène Ahmadi (les Inrocks)

Mots d’ados et mise en style : Kiffe Kiffe demain de Faïza Guène, de Marc Sourdot

L’épisode de la Poudre avec Faïza Guène

“Le jeune de banlieue”, cet être “aussi réaliste qu’une licorne”, Thomas Guenole sur Slate

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